Des traitements prometteurs contre l’arthrose (partie 2 Un médicament à l’essai)

Il existe heureusement d’autres axes de recherche nourrissant l’attente d’un nouveau médicament. Parmi eux, des travaux s’intéressent à la voie de signalisation cellulaire Wnt qui permet la transmission d’un message à l’intérieur d’une cellule pour modifier son activité. Ses déséquilibres jouent un rôle dans le développement de l’arthrose. «Le produit en cours d’étude, le lorecivivint, cible les chondrocytes en les empêchant de fabriquer ce qui va détruire la matrice cartilagineuse», explique le Pr Berenbaum. La phase 3 des essais est en cours pour ce médicament administré sous forme d’injection intra-articulaire et ciblant pour l’heure l’arthrose du genou. Elle doit confirmer les bons résultats observés au cours des étapes précédentes, qui montraient un ralentissement de la destruction du cartilage. Là encore, comme pour la sprifermine, la grande inconnue demeure les effets sur les symptômes, considérés par les agences sanitaires comme un critère indispensable à la validation d’un nouveau traitement de fond. L’idée sous-jacente consiste à retarder la mise en place d’une prothèse et les coûts induits.

La stimulation du nerf vague

Une solution viendra peut-être de la stimulation auriculaire du nerf vague. Ce nerf crânien, qui s’étend jusqu’à l’abdomen en passant par le cou et le thorax, appartient au système nerveux autonome et sert au fonctionnement de nombreux organes internes. Il a pour particularité de produire des effets anti-inflammatoires quand il est stimulé. Une caractéristique déjà mise à profit dans la prise en charge de la migraine, de la colopathie ou de l’épilepsie. En ce qui concerne l’arthrose, l’idée des chercheurs est de stimuler le nerf de façon non invasive, par l’intermédiaire d’un petit boîtier placé au niveau de l’oreille, où se trouvent des terminaisons nerveuses. «Après un premier test chez 18 patients atteints d’arthrose érosive douloureuse de la main, le dispositif est bien toléré et diminue les douleurs, décrit le Pr Sellam qui coordonne les essais sur le sujet. Il faut maintenant confirmer ces bons résultats dans un test randomisé contre stimulation factice.» Les premiers résultats de cette étude, lancée en avril 2021 dans 18 centres, sont attendus fin 2022.

Des injections de cellules souches

Les cellules souches peuvent-elles venir à la rescousse dans la prise en charge de l’arthrose? C’est l’une des pistes de recherche suscitant le plus de travaux. «Depuis 5 ans, plusieurs études contrôlées contre placebo et quelques méta-analyses décrivent un bénéfice de la thérapie cellulaire, au moins sur les symptômes, rapporte le Pr Christian Jorgensen, directeur de l’Institut de médecine régénératrice et de biothérapies. Ils restent pour l’instant modestes, de l’ordre de 30% sur la douleur et de la fonction. Mais en stimulant les cellules mésenchymateuses basiques, qui peuvent se différencier en plusieurs types de cellules, nous sommes parvenus à favoriser leur différenciation en chondrocytes, et à améliorer d’au moins 50 % les symptômes douloureux.»

Les cellules souches représentent les thérapies de demain. Elles permettront de reconstruire les tissus. «En plus de leur effet anti-inflammatoire et antalgique, elles semblent capables d’améliorer la structure des articulations malades», poursuit le médecin. L’étude européenne Adipoa, qu’il chapeaute depuis le CHU de Montpellier, se charge de constater les effets d’injections dans l’articulation de cellules souches mésenchymateuses prélevées dans les tissus adipeux des patients. Elle se termine fin janvier 2022 et sera suivie quelques mois plus tard par la phase 3.

Des patchs et des bioprothèses

«Nous mettrons sûrement l’accent sur des cellules allogéniques plutôt qu’endogéniques, précise le Pr Jorgensen. Les cellules mésenchymateuses ne seront plus prélevées pour être ensuite réinjectées sur le même patient. C’est un procédé trop onéreux. Elles seront prélevées sur un donneur et pourront ainsi servir à 200 personnes, sans aucun problème de rejet.» Si les résultats préliminaires sont confirmés, l’enjeu consistera alors à disposer de plateformes de bioproduction opérationnelles. Or ces structures très coûteuses n’existent pas actuellement en France. Un seul site est en cours de construction à Montpellier, qui devrait être terminé en 2024.

Les recherches autour des cellules souches se poursuivent en tentant de maximiser leur effet. L’Inserm et le CHRU de Strasbourg développent un patch composé de biomatériaux sur lequel sont insérées les cellules mésenchymateuses qui pourront être posées directement dans l’articulation. «Nous imprimons en 3D une partie du cartilage lésé avec une bioencre dans laquelle on intègre les cellules souches, illustre le Pr Jorgensen. Il sera alors possible de fabriquer des prothèses biologiques.»Les prothèses, en titane, pourraient céder leur place à des nouvelles articulations vivantes.

Toutes les articulations sont touchées

Tous sexes confondus, après 65 ans, le pourcentage d’arthroses détectées varie en fonction de l’articulation. Le cou, les vertèbres lombaires et la main sont les plus atteints.

•Cou: 75 % des cas

Passé 40 ans, l’arthrose cervicale (cervicarthrose) apparaît presque toujours sur les radiographies sans forcément provoquer de symptômes. Mais elle peut rimer avec une raideur de la nuque et un mal de cou (cervicalgie).

•Genou: 30 % des cas

La gonarthrose touche principalement les femmes après 40 ans. La douleur, ressentie sur la face externe ou interne du genou, est surtout déclenchée par l’activité physique, la marche, la montée ou la descente d’un escalier.

•Hanche: 10 % des cas

La coxarthrose se révèle généralement vers l’âge de 60 ans. Les douleurs se manifestent le plus souvent dans le pli de la fesse ou de l’aine, mais peuvent irradier jusqu’au genou, en courant sur le devant de la cuisse.

•Main: 60 % des cas

L’arthrose de la main est fréquente chez la femme ménopausée. Elle se traduit par des douleurs et des déformations au niveau des dernières phalanges des doigts (arthrose digitale) ou de la racine du pouce (rhizarthrose).

•Pied: 10 % des cas

Ce type d’arthrose touche surtout les sportifs de haut niveau (microtraumatismes réguliers), les personnes ayant subi des traumatismes importants (entorses ou fractures) et celles atteintes de malformations (hallux valgus, notamment).

•Lombaires:70 % des cas

L’arthrose lombaire est l’arthrose rachidienne la plus fréquente. Les douleurs se manifestent tous les jours et empirent au cours d’activités physiques ou lors de postures statiques (debout, assis, à genou) trop longues.

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