Les fondateurs des Etats-Unis ont construit le pays sur la base de la suprématie blanche, tout simplement parce que cela reflète leur nature profonde.
Les premiers esclaves foulèrent la terre de l’Amérique du Nord en 1619, un an avant les pilgrim fathers, ces pères-pèlerins (considérés comme les fondateurs des Etats-Unis) arrivés eux en 1620. Les orchestrateurs et bénéficiaires de cette traite vont faire de l’esclave, un bien meuble qui à cet effet, n’aura pas valeur humaine. Afin d’institutionnaliser leur pratique, les Etats vont couvrir leurs actes par un vernis juridique et réglémentaire sous forme de lois. Ainsi, entre 1619 et 1865, la Virginie adopte plus de 130 lois sur l’esclavage pour réglementer la propriété des Noirs étendu aussi à leur descendance. La loi de 1662 fait de tous les enfants de mères esclaves systématiquement des esclaves, et ce, quels que soient la race ou le statut du père. Par celle-ci, un enfant métis né du viol commis par des maîtres blancs sur une esclave ne peut être libre. La réligion, ne saurait non plus être une échappatoire puisqu’ une loi de 1667 codifie que les esclaves convertis au christianisme restent tout de même esclaves. Le christianisme dont se réclame les maitres l’est elle aussi soumise à cet effet. Elle est formulée comme ci «CONSIDÉRANT que certains doutes ont surgi quant à savoir si les enfants qui sont esclaves de naissance, et qui, par la charité et la piété de leurs propriétaires, sont devenus bénéficiaires du saint sacrement du baptême, devraient, en vertu de leur baptême ,être rendus libres… l’octroi du baptême ne change pas la condition de la personne quant à son esclavage ou à sa liberté ». Une directive qui a le mérite d’être très clair.La loi de 1669 quant à, elle autorise carrément le meurtre d’esclaves si ces derniers défient et résistent à l’autorité .
Si la Virginie a écrit des lois esclavagistes exécrables, elle n’en détient pas pour autant, le monopole. Un autre Etat, celui de la Caroline du Sud a adopté en 1740, un code esclavagiste complet de 57 dispositions « afin que l’esclave soit maintenu dans la soumission et l’obéissance qui lui sont dues ». Ces dispositions interdisaient entre autres notamment aux esclaves, de cultiver ou de posséder leur propre nourriture, de se réunir en groupes ou d’apprendre à lire.
La Georgie ne pouvait être en reste. En 1755, elle exigea que tous les propriétaires de plantations ainsi que leurs employés blancs, servent dans la milice d’État, chargée de faire respecter les lois sur l’esclavage. Joseph Clay, un marchand de Savannah, décrivit le rôle de l’esclavage en 1784 en ces termes: «Le commerce des Noirs est un enjeu majeur pour nous. Il est au commerce de ce pays ce que l’âme est au corps, et sans lui, aucune maison ne peut trouver une stabilité convenable.»On ne peut être plus clair, l’esclavage étant le moteur économique des Etats du sud, on comprend dès lors pourquoi les en priver ne pouvait qu’ entraîner une résistance farouche, débouchant sur la guerre de sécession.
Il faut dire que quarante des 56 signataires de la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis possédaient des esclaves et selon la Constitution, un esclave équivalait aux trois cinquièmes d’une personne libre. Dix des douze premiers présidents possédaient des esclaves. La nation américaine a donc été bâtie sur l’esclavage.
L’événement de Tulsa en 1921, un acte terroriste non reconnu comme tel
Six ans avant le retentissant attentat de 2001 orchestré par Al Quaida, il y’a eu Oklohoma City en 1995. Ces deux événements sont considérés comme terroristes mais celui de Tulsa en 1921 n’est pas traité comme tel même s’il épouse les mêmes caractéristiques à savoir des tueries de masse et de grande ampleur sur des civils, plus de 300 morts, environ 6000 blessés, de nombreuses destructions de bâtiments et d’habitation, et environ 10.000 Noirs sans abri. Des armes de destruction massive comme des mitrailleuses et même des avions utlisant des bombes pour massacrer des populations civiles.
En ce début du Xxè siècle à Tulsa deuxiéme ville de l’Oklahoma, Etat qui a prospéré grâce à la découverte du pétrole, il y’a le quartier de Greenwood, sa bourgeoisie noire locale et sa célèbre artère Black street. Une rue unique et singulière, réceptacle d’un environnement de Noirs et Amérindiens enrichis grâce aux découvertes pétrolières. Une situation bien singulière qui contraste avec l’imagérie populaire d’une population noire pauvre et misérable dans tout le pays. Supportant mal l’idée de voir des Noirs riches, les autorités cherchent à imposer des mesures officielles de ségrégation. Ainsi en 1914, la ville adopte une loi interdisant à quiconque de vivre dans un quartier où plus des trois quarts des résidents sont d’une autre race. Les Noirs et les Minorités vivent donc entre elles. Et quoiqu’ isolé, Greenwood prospère quand même.Son artère principale compte des cabinets d’avocats, des garages automobiles, des cafés, un cinéma, des pompes funèbres, des salles de billard, des salons de beauté, des épiceries, des fourreurs et des confiseries.
Le ressentiment grandissant des Blancs envers cette communauté est palpable et constitue par là même une poudrière qui n’attend qu’une étincelle pour s’enflammer. Et l’occasion viendra d’une allégation d’agression sexuelle d’un adolescent noir de 19 ans nommé Dick Rowland, cireur de chaussures, à l’égard d’une jeune fille blanche de 17 ans Sarah Page, opératrice d’ascenceur. Il semble qu’en allant aux seules toilettes de l’immeube Drexel autorisées par les lois ségrégationnistes, le jeune a trébuché par mégarde sur Sarah Page, ce qui la fit hurler.Un individu qui butte par accidentellement sur une opératrice d’ ascenceur, fait quasi banal sauf si le fautif est noir et l’autre une fille blanche.Un passant ayant entendu le cri de la jeune fille a appelé la police, et « comme un jeu de téléphone, l’histoire est devenue plus incendiaire à chaque nouvelle version en se répandant rapidement ». Une histoire qui rappellera 34 plus tard l’affaire Emmet Till, un adolescent noir de 14 ans lynché pour offense envers une femme blanche.
Le déroulé de l’histoire
Pour prévénir tout lynchage de Rowland lors de son procès, des vétérans noirs de la première guerre mondiale se sont rendus armés devant le palais justice. Une crainte motivée par ce qui s’était déjà produit un an plus tôt en août 1920, sur la personne d’un jeune blanc accusé de meutre. Un journal local a écrit à propos de cette affaire que la police n’avait pas fait grand chose pour protéger le détenu lors du transfert de sa cellule au tribunal du comté. Un groupe de blancs l’avaitintercepté, soustrait des mains de la police et l’avait lynché.
Ce serait encore le cas à cette occasion avec un facteur de déflagration d’autant plus que cette fois, il s’agissait d’un Noir, donc de racisme. D’un groupe d’hommes blancs réuni devant le palais de justice, se détacha un homme qui, s’approchant d’un vétéran noir venu au procès du jeune noir, lança « Nègre, qu’est-ce que tu vas faire de ce pistolet ? » « Je m’en servirai si besoin », a-t-il répondu. L’homme blanc a saisi l’arme et un coup de feu a retenti. On ignore s’il s’agissait d’un accident, d’un tir de semonce ou d’une tentative de blesser ou de tuer. Quoi qu’il en soit, ce fut le début d’une violente bataille.
Les deux groupes se livrèrent à une fusillade acharnée jusqu’à Greenwood. Arrivés en renfort sur place, des Blancs, de plus en plus nombreux, commencèrent à tirer sans discernement sur les passants noirs. Des Noirs furent abattus dans les rues et traînés derrière des voitures, la corde au cou. Puis vinrent les avions comme raconte Buck Colbert Franklin un avocat noir de Tulsa. « Je voyais des avions tourner en rond dans les airs » . « Ils se multipliaient, vrombissaient, filaient et descendaient bas. J’entendais comme de la grêle tomber sur le toit de mon immeuble. » « À East Archer, j’ai vu par la fénêtre le vieil hôtel Mid-Way en feu, brûlant de tous côtés, puis un autre, puis un autre, puis un autre encore, se consumer de tous côtés », en décrivant le bombardement aérien de Greenwood. « Les trottoirs étaient couverts de boulettes de térébenthine enflammées. Je ne savais que trop bien d’où elles venaient. » Des Noirs fuyant des maisons en flammes étaient mitraillés en pleine rue.
Le massacre de Tulsa a détruit plus de 35 pâtés de maisons de la ville, ainsi que plus de 1200 maisons, et a fait quelque 300 morts, principalement des Noirs. Dix mille personnes se sont retrouvées sans abri. Pourtant, cet acte de terrorisme intérieur est rarement évoqué ou enseigné dans les écoles. Des célébrations et commémorations sélectives dans un pays qui en a pourtant fait une des bases de sa culture et de son expression collective.
La guerre de sécession contre l’esclavage
Une étude menée par le Southern Poverty Law Center en 2017 montre que les écoles américaines échouent à enseigner la vérité sur l’esclavage africain. Seuls 8 % des lycéens interrogés identifient l’esclavage comme la cause principale de la guerre civile. Deux tiers (68 %) ignorent qu’il a fallu un amendement constitutionnel pour mettre officiellement fin à l’esclavage. Moins d’un élève sur quatre (22 %) est capable d’identifier correctement les dispositions de la Constitution qui ont favorisé les propriétaires d’esclaves. La vérité est évidente, si l’on choisit de la voir.
En 1860, l’Amérique comptait 4 millions d’esclaves, pour une valeur totale de 3 milliards de dollars de la monnaie de l’époque.
L e professeur émérite David William Blight a écrit que la valeur totale de tous les esclaves combinés, en tant que propriété, en 1860 était supérieure à la valeur de chaque banque, usine et chemin de fer aux États-Unis. En 1860, l’Amérique comptait 4 millions d’esclaves, pour une valeur totale de 3 milliards de dollars de la monnaie de l’époque. Par conséquent, il y avait plus de millionnaires dans la vallée du Mississippi – notamment l’une des régions les plus pauvres d’Amérique aujourd’hui – que partout ailleurs dans le pays.
Les États du Sud ont eu une conception et une philosophie bien particulières sur l’esclavage et ont à cet effet, émis les raisons pour lesquelles ils ont quitté l’Union :
Au Texas – «Tous les hommes blancs ont et devraient avoir droit à des droits civils et politiques égaux ; la servitude de la race africaine, telle qu’elle existe dans les États, est mutuellement bénéfique aux esclaves comme aux hommes libres et est abondamment autorisée et justifiée par l’expérience de l’humanité et la volonté révélée du Créateur Tout-Puissant… »
Mississippi « Notre position est totalement identifiée à l’institution de l’esclavage – le plus grand intérêt matériel du monde… Un coup porté à l’esclavage est un coup porté au commerce et à la civilisation. »
Louisiane « Les peuples des États esclavagistes sont liés par la même nécessité et la même détermination de préserver l’esclavage africain. »
Les sécessionnistes de Floride « Dans le Sud, et chez notre peuple bien sûr, l’esclavage est l’élément de toute valeur, et sa destruction détruit tout ce qui est propriété. »
Géorgie «Au cours des dix dernières années, nous avons eu de nombreux et sérieux motifs de plainte contre nos États confédérés non esclavagistes au sujet de l’esclavage africain. Ils ont cherché à affaiblir notre sécurité, à troubler notre paix et notre tranquillité intérieures, et ont obstinément refusé de se conformer à leurs obligations constitutionnelles expresses envers nous concernant ces biens…»
Le vice-président Alexander H. Stephens de la Confédération, dans son « discours de la pierre angulaire » de 1861, était aussi clair que possible : « Notre nouveau gouvernement est fondé sur… la grande vérité que le nègre n’est pas l’égal de l’homme blanc ; que la subordination de l’esclavage à la race supérieure est sa condition naturelle et normale. »
Francis Key qui a écrit l’hymne national américain était un supémaciste blanc avoué
Le troisième couplet de l’hymne national «The Star spangled-banner» célèbre le meurtre des esclaves : «Aucun refuge ne pouvait sauver le mercenaire et l’esclave de la terreur de la fuite ou de l’obscurité de la tombe…» Certains prétendent que Key faisait référence aux Blancs capturés par les Britanniques et contraints de se battre pour eux alors qu’il parle bien d’esclave. Aucune preuve historique ne vient étayer cette affirmation, et les faits concernant Key la rendent peu probable.
Key était issu d’une riche famille de propriétaires d’esclaves du Maryland. Quelques semaines avant d’écrire l’hymne national, il avait vu les marines coloniaux–des esclaves noirs ayant combattu aux côtés des Britanniques pendant la guerre de 1812 – aider les Britanniques à repousser les soldats américains vers Washington, D.C., puis à incendier la Maison-Blanche. Il affirmait que les Noirs étaient une race distincte et inférieure dont l’expérience s’avère être le plus grand mal qui afflige la communauté ».
En tant que procureur à Washington, DC, il a requis la peine de mort contre un homme qui possédait des écritsabolitionnistes, en déclarant au jury : « Êtes-vous prêts, messieurs, à abandonner votre pays, à permettre qu’il vous soit enlevé et occupé par l’abolitionniste, selon le goût duquel il a de s’associer et de s’amalgamer avec les Noirs ? »
Les réparations de l’esclavage déjà payées
Le 16 avril 1862, plus de huit mois avant la publication de sa Proclamation d’émancipation, Abraham Lincoln signa une loi mettant fin à l’esclavage dans le District de Columbia. Cette loi prévoyait l’émancipation immédiate des esclaves et une indemnisation des propriétaires fidèles à l’Union, pouvant atteindre 300 dollars par esclave libéré. Au cours des neuf mois suivants, le conseil des commissaires chargé d’administrer la loi approuva, en tout ou en partie, les pétitions d’anciens propriétaires demandant la libération de 2989 anciens esclaves. L’administration Lincoln versa environ un million de dollars aux propriétaires d’esclaves du District de Columbia pour la perte de leurs biens.